Umami: tout ce qu'il faut savoir sur cette cinquième saveur – L'Express – L'Express

Derrière ce drôle de nom japonais se cache un goût mystérieux, (à distinguer du salé, du sucré, de l’acide et de l’amer). Une énigme pour les palais occidentaux? Pas tant que ça, puisqu’il se retrouve dans de nombreux aliments de par le monde. Voici les clés pour atteindre ce 7e ciel culinaire.
La saveur umami se retrouve aussi dans les charcuteries, comme le speck italien.
Getty Images/iStockphoto
Souvenez-vous, à l’école primaire, on nous apprenait que la langue dispose de récepteurs spécialisés capables de ressentir quatre goûts fondamentaux: le salé, le sucré, l’acide et l’amer. On nous a menti! Il existe une cinquième saveur, mise à jour au début du XXe siècle par un chercheur japonais, qui fait en ce moment son grand coming-out en Occident: l’umami ,­ prononcez “oumami”.
Ce drôle de mot, contraction de “umai” (délicieux) et “mi” (goût), se traduit littéralement par “goût délicieux”. Mais bizarrement, il serait “basique et assez neutre” selon Laurent Séminel, auteur d’un livre sur la question chez Marabout (Umami, le cinquième goût savoureux) qui le caractérise comme le goût d’un bouillon de boeuf pas salé. “C’est le goût lemoins mystérieux du monde, la première saveur que connaît un bébé qui tête le sein de sa mère puisque le lait maternel est très riche en umami…” poursuit-il. Pourquoi en faire tout un fromage alors ? Sans doute parce que “c’est le goût de ce qui est bon” tranche Chihiro Masui, qui a signé de nombreux livres de cuisine, dont La cuisine du Japon (Gründ).
Pour comprendre, revenons à ses prémices… En 1825, dans sa Physiologie du goût, Brillat-Savarin, le grand théoricien de la cuisine française, pointe du palais cette saveur sous le terme d'”osmazôme”. Un bide total qui ne retiendra pas l’attention. Quelque 80 ans plus tard, Kikunae Ikeda, chimiste à l’Université impériale de Tokyo, a une révélation. Avec un dashi, bouillon japonais qui sert de base à la soupe miso, il identifie une saveur différente des quatre de base et la nomme “goût savoureux”.
Son nom et son histoire aidant, il est aisé de faire l’amalgame entre umami et cuisine nippone. À tort, puisque même si elle est indissociable de la culture culinaire de l’archipel, celle-ci n’en a pas l’exclusivité. Chihiro Masui corrobore: “cette saveur existe dans toutes les civilisations même si le mot pour la définir n’est pas traduit dans les langues occidentales”. Pourquoi croyez-vous que les Italiens parsèment du parmesan sur leurs pâtes, que les chefs français ajoutent des oignons ou des carottes dans leur bouillon et que la cuisinière vietnamienne utilise du nuoc-mâm (condiment à base de poisson fermenté) à toutes les sauces? Ils recherchent tous l’effet umami.
“Comme Monsieur Jourdain fait de la prose sans le savoir, nous mangeons de l’umami sans nous en rendre compte” caricature Laurent Séminel. Dans les asperges, le roquefort, le jambon cru, le ketchup… “Et même dans la pizza” lance Alexandre Bourdas, chef double étoilé du Sa.Qua.Na à Honfleur, qui l’a découvert lors d’un séjour de trois ans au Japon. Quantité d’aliments que nous consommons chaque jour en sont bourrés, tout le monde l’a donc forcément déjà ressenti un jour.
La définition graphique de la saveur umami.
© / Zeste
De là à l’identifier… “Plus qu’un goût, c’est une sensation qui se passe au milieu de la langue, au-dessus du palais, quelque chose de très appétant, très rond et gourmand, légèrement salin, qui donne envie d’y revenir”, tente de décrire Alexandre Bourdas. En bref, une sensation de plaisir pour les papilles qui donne envie de replonger illico sa fourchette dans son assiette, de spaghetti bolognaise par exemple. C’est une sorte de jouissance culinaire que l’on aspire à revivre encore et encore en somme!
Scientifiquement, le secret de l’effet umami tient en trois acides aminés: glutamique, guanylique et inosinique. Ces substances, naturellement présentes dans certaines viandes, légumes, poissons, crustacés et dans les aliments fumés, fermentés ou vieillis, sont responsables de cette sapidité qui fait “wizz” en bouche. Avec une particularité: l’association de deux de ces acides dépasse en goût la somme des deux ingrédients. C’est-à-dire qu’en mariant des aliments très umami entre eux, on décuple le plaisir. Le dashi en est un bel exemple puisqu’il mélange algues kombu, copeaux de bonite (cousine du thon) séchée et champignons shiitake.
Dans une recette, Alexandre Bourdas exploite ces synergies avec une combinaison “umamissime” d’algues nori, de sardines grillées, de sauce soja, de roquefort et d’épinards sur une brioche de seigle. Le résultat est sans appel: il appelle à l’addiction. “Dans la cuisine quotidienne, c’est pratique de savoir qu’en ajoutant de l’umami, ça va rendre un plat moins fade mais ce n’est pas la solution à tous les maux, ça ne suffit pas à faire bon” révèle ChihiroMasui. Dans les faits, ce n’est pas si compliqué : il s’agit de privilégier les légumes bien mûrs, de faire revenir des pommes de terre dans du gras de porc plutôt que dans l’huile, de mettre une goutte de sauce soja dans la vinaigrette ou de cuisiner des plats tout simples tels des petits pois à la française ou des gnocchis gratinés anchois-tomates. “Quand on est gourmand, on le pratique de façon inconsciente car on sait que ces produits sont savoureux, note Alexandre Bourdas, mais il faut que ça reste naturel.” Car le glutamate monosodique, ouMSG (E621) est largement répandu dans les plats industriels et dans les cuisines des restaurants asiatiques. Ce glutamate-là, qui n’a rien à voir avec celui que l’on trouve natu- rellement dans les ingrédients cités plus haut, exacerbe certes le goût umami mais a des effets secondaires sur la santé (nausées, bouffées de chaleur…).
Vous vous êtes toujours demandé pourquoi vous n’arriviez pas à vous retenir de finir la coupelle de saucisson à l’apéro? Ne cherchez plus, c’est la faute de l’ami umami.

Où goûter l’umami
Petite liste non-exhaustive d’ingrédients très riches en umami: tomates mûres, fromages affinés (parmesan, stilton, roquefort, cheddar…), champignons séchés (shiitake, morilles…), sauce soja, anchois, asperges, bonite séchée, charcuterie, oignon, truffe, algues wakamé, kombu, nuoc-mâm …
160 pages dédiées à la cinquième saveur, rien que ça! Il faut dire que l'umami, découvert au Japon en 1908, passionne les chefs et les scientifiques. Dans "Umami, The Fifth Taste", ouvrage de référence paru en septembre dernier (Japan Publications Trading Co, en anglais uniquement), ils sont dix cuisiniers (Yoshihiro Murata, Alexandre Bourdas, David Kinch, Heston Blumenthal…), à célébrer ce "goût savoureux". Deux experts, John Prescott et Ole Mouritsen, font également le point sur les aspects historiques et scientifiques.
© / Japan Publications Trading Co

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