La petite boîte de thon appauvrit les océans et ruine notre santé – notre-planete.info

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Nous sommes friands des boîtes de thon : pratiques et goûteuses, elles accompagnent sandwichs et salades d’été. Pourtant, elles masquent des techniques de pêche particulièrement destructrices pour les ressources marines, sont inéquitables pour les petits pêcheurs et contiennent de dangereux métaux lourds. Quelles sont les marques de thon les plus respectueuses des ressources halieutiques ? Greenpeace France mène campagne et dénonce le greenwashing des plus gros producteurs.
Au niveau mondial, cinq millions de tonnes de thons sont pêchées par an… Il s’agit de l’une des plus importantes pêcheries au monde. La pression est telle que la quantité de thons, maquereaux et bonites a diminué de 75% par rapport à 1970 (Rapport Planète Vivante Océans – WWF). Mais voilà, le marché du thon pèse un peu plus de 7 milliards d’euros. Les premiers consommateurs de thon en boîte sont les Américains, suivi des Britanniques. Les Français en sont également friands puisque près de 90 % possèdent une boîte de thon dans leur placard. Au total, chaque année, les ménages français en achètent 421 millions, soit plus de 15 boîtes par an et par ménage. La consommation de thons et d’espèces apparentées en boîte ou en sashimi est en augmentation, indique la FAO.
Les espèces de thon qui se retrouvent en boîte sont, dans l’ordre décroissant :
En France, le thon albacore est l’espèce de thon tropical la plus consommée et c’est elle que l’on retrouve le plus souvent dans les boîtes de thon. Pratique, rapide, apprécié dans les sandwichs, la petite boîte de thon en aluminium masque pourtant une gestion catastrophique des ressources marines.
Deux tiers des stocks de thons sont victimes de la surpêche ou pêchés à la limite de durabilité biologique. Concernant les sept principales espèces de thon, on considère qu’un tiers des stocks sont surexploités.
Avec l’augmentation du nombre de consommateurs et l’ouverture du marché mondial, le thon en boîte a connu une demande croissante qui a même mené à une surproduction, explique la FAO. Malheureusement, les ressources halieutiques viennent à manquer : de nombreuses espèces de thon présentes dans les zones tempérées « sont d’ores et déjà surexploitées sinon épuisées. » ajoute la FAO. Et les espèces de thon vivant en milieu tropical subissent une pêche excessive, notamment le thon obèse et le thon germon que l’on retrouve bien souvent en boîte.
Le thon pourrait être pêché durablement, malheureusement une technique de pêche relativement récente compromet sérieusement les ressources marines. Il s’agit des dispositifs de concentration du poisson (DCP – Fish Aggregating Device en anglais) qui sont dénoncés notamment par une nouvelle campagne de Greenpeace.
Un dispositif de concentration de poissons (DCP) est un assemblage d’objets flottants se prolongeant sous l’eau par des chaînes ou filets. De nombreuses cavités se forment et permettent aux poissons de s’abriter, de se nourrir, de se reproduire. Les petits poissons trouvant refuge dans les DCP attirent de plus gros poissons, attirant eux-mêmes les thons qui s’en approchent en bancs pour se nourrir.
Une fois que la quantité de poissons piégés par le dispositif est jugée suffisante, les thoniers se rendent sur la zone, déploient un grand filet, la senne, autour du DCP et remontent tout ce qui se trouve autour : les thons mais aussi tous les autres animaux marins présents.
La pêche au thon sur DCP permet de multiplier les prises par 2, voire par 10 pour certaines espèces. Ce qui explique l’intensification de cette méthode industrielle. Ainsi, entre 1990 et 2000, les prises de thons tropicaux ont augmenté de 100%.
Cependant, elle n’est pas sans conséquences, à la fois pour les thons, les ressources marines dans leur ensemble et les pêcheurs à la ligne.
Tout d’abord, elle est non sélective. Elle va remonter à la surface des espèces non visées, telles que des requins, des raies ou des tortues, mais aussi des thons juvéniles qui n’ont pas encore eu le temps de se reproduire. Ces espèces non visées, que l’on appelle les prises accessoires, vont être rejetées à la mer mortes ou mourantes.
Au niveau mondial, la pêche thonière tropicale sur DCP génère 2 à 4 fois plus de rejets que la même pêche sans DCP, soit 100 000 tonnes par an. C’est autant que la quantité de thon péché… Ce gâchis colossal représente l’équivalent de 625 millions de boîtes de thon !
Résultat : aujourd’hui il ne reste plus que 35% à 55% des stocks existants avant la pêche industrielle…
Aujourd’hui, il n’y a pas de contrôle de l’usage des DCP. Les bateaux français pratiquant la pêche au thon peuvent avoir jusqu’à 150 DCP à bord. Ce chiffre peut atteindre plusieurs centaines lorsqu’il s’agit des bateaux espagnols. Ainsi, le nombre de DCP déployés par l’Espagne est estimé à 5 760 ! « Dans l’Atlantique oriental, par exemple, le problème est devenu si aigu que les flottilles industrielles (senneurs français et espagnols) mettent en place des mesures visant à limiter l’utilisation des DCP, qui s’appliqueront à elles-mêmes. » précise la FAO.
Au niveau mondial, le nombre de DCP dans l’océan est estimé à 91 000, sans aucun contrôle particulier, ni restriction. Ainsi, « les bateaux français pratiquant la pêche au thon peuvent avoir jusqu’à 150 DCP à bord. Ce chiffre peut atteindre plusieurs centaines lorsqu’il s’agit des bateaux espagnols. Ainsi, le nombre de DCP déployés par l’Espagne est estimé à 5 760 ! », note Greenpeace.
Les conséquences sont aussi dramatiques pour les communautés de pêcheurs traditionnels. En effet, les grands thoniers senneurs pêchent sans aucune distinction, et les poissons les plus jeunes sont sacrifiés. Ce n’est pas le cas des petits pêcheurs locaux qui visent que les gros poissons arrivés à maturité, grâce à des hameçons qui ne prennent pas les poissons juvéniles.
En outre, les géants de la pêche pratiquent le transbordement qui consiste à décharger une marchandise d’un thonier sur un cargo réfrigéré qui fait la navette avec le port, ce qui permet aux navires de pêche d’éviter de retourner au port et de maximiser ainsi leurs prises, mais aussi leur pression sur la faune aquatique et les pêcheurs ! “Les nombreuses dérives liées à cette pratique ont conduit à des violations graves des droits humains”, précise Greenpeace.
Malheureusement, les petits pêcheurs ne peuvent lutter contre les thoniers qui raflent toutes les prises et les proposent ensuite sur les marchés locaux à des prix défiant toute concurrence.
La pêche et la commercialisation du thon est un business mondialisé à la tête duquel on retrouve quatre grands groupes : FCF (Taïwan), Itochu (Japon) , Tri-Marine (USA) et Thaï Union Frozen Product (Thaïlande).
Les deux marques françaises, Petit Navire et Saupiquet, appartiennent respectivement à Thaï Union et Tri Marine. Le thon voyage énormément entre le moment où il est pêché et sa vente en boîte. Il peut être pêché dans l’océan Atlantique en Afrique de l’Ouest par un bateau coréen, mis en conserve en Côte d’Ivoire, et vendu en France.
Les bateaux de pêche français ne vendent pas l’intégralité de leur pêche aux marques françaises. Ils contribuent à environ 20% de l’approvisionnement des boîtes que l’on retrouve dans les rayons français.
En juillet 2017, Greenpeace annonçait que le groupe Thaï Union, maison-mère de Petit Navire et de ses marques sœurs (John West, Chicken of the Sea, Mareblu, et Sealect), s’était enfin engagé “à prendre des mesures qui permettront de réduire significativement l’utilisation des dispositifs de concentration de poissons (DCP), de protéger celles et ceux qui travaillent sur les bateaux de fournisseurs, et de renforcer le soutien du groupe pour le développement d’une pêche durable”, principalement grâce à la campagne acharnée de l’ONG et à la mobilisation citoyenne. Ainsi, “d’ici 2020, l’entreprise va diminuer de moitié environ le recours aux DCP dans sa chaîne d’approvisionnement. Elle va également doubler l’offre de thon pêché sans DCP dans les pays au sein desquels Thai Union et ses filiales sont présentes”.
Fin mai 2014, à Colombo au Sri Lanka s’est tenue la conférence annuelle de la Commission des Thons de l’Océan Indien (CTOI), réunissant les pays impliqués dans la pêche aux thons tropicaux dans l’océan Indien. Ces pays comptent notamment la France et l’Espagne, représentées par l’Union européenne.
Si les destructions des dispositifs de concentration du poisson sont connus, aucune mesure de restriction ou d’encadrement n’a été adoptée lors de cette rencontre : les membres de la CTOI s’y sont opposés avec en tête de file l’Union européenne. Un refus qui s’explique notamment par sa volonté de défendre les intérêts de l’industrie de la pêche espagnole.
« Cette attitude est inacceptable, et elle est en contradiction complète avec les avancées de la nouvelle PCP (Politique Commune des Pêches), telles que la lutte contre les prises accessoires, la reconstitution des stocks ou la lutte contre les capacités de pêche excessives. L’Europe doit être cohérente et ne pas avoir des objectifs au rabais lorsqu’il s’agit de pêcher dans les eaux lointaines de l’océan Indien. » s’indigne François Chartier, chargé de campagne Océans chez Greenpeace.
Selon une enquête de 60 millions de consommateurs parue en mai 2016, “toutes les conserves testées contiennent du mercure, de l’arsenic et du cadmium, à des concentrations très variables selon les références.” Et le labo de 60 millions a analysé quinze conserves de grandes marques (Petit Navire, Saupiquet, Connétable, etc.) et de marques de distributeurs (Carrefour, Auchan, Leader Price, Casino, etc.), c’est dire…
“Globalement, la conserve de thon de la marque Leader Price s’en sort le mieux. En revanche, pour le mercure, trois références dépassent la moitié de la valeur réglementaire, qui est de 1 mg/kg : Petit Navire, Capitaine Nat’ et Odyssée (Intermarché). L’arsenic présent dans la plupart des conserves analysées atteint même 1,7 mg/kg chez Capitaine Nat’, un taux près de six fois plus élevé que dans le produit Carrefour.” indique 60 millions de consommateurs.
Ces résultats ne sont pas vraiment une surprise car les prédateurs marins comme le thon accumulent les éléments traces métalliques (métaux lourds), issu de nos activités polluantes, dans leurs tissus. C’est pourquoi le Biodiversity Research Institute recommande de ne pas consommer de thon plus d’une fois par mois. Oui, nous avons tellement pollué nos océans que nous ne pouvons plus nous en nourrir sainement.
Cette pêche irresponsable n’est pas une fatalité, puisqu’il est tout à fait possible de :
Christophe Magdelaine Christophe Magdelaine / notre-planete.info
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La petite boîte de thon appauvrit les océans et ruine notre santé ; 24/11/2017 – www.notre-planete.info
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