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Manger régulièrement du poisson est à priori bon pour la santé sauf que les mers et océans de notre planète sont maintenant tellement polluées que les poissons sont contaminés au mercure. Un véritable casse-tête pour se nourrir sainement…
La consommation mondiale d’animaux marins par habitant a doublé en 50 ans : elle est passée de 10 kg en 1960 à 20 kg en 2014, avec de fortes disparités régionales. En Europe et en Amérique du Nord, la consommation dépasse même 25 kg par habitant.
Il existe un consensus sur la valeur ajouté nutritionnelle du poisson dans notre alimentation mais c’était sans prendre en compte la pollution au mercure des mers et océans qui a été multipliée par trois depuis la révolution industrielle.
Le Biodiversity Research Institute et le Zero mercury working group, ont lancé des alertes sur la contamination au mercure des poissons suite aux résultats inquiétants de prélèvements marins effectués dans des zones de pêches synthétisé dans un récent rapport.
Originellement, la consommation de poisson est conseillée puisque selon la FAO, “le poisson est le plus sain des aliments” : “c’est un gros fournisseur de micronutriments essentiels pour une bonne alimentation. Au-delà de l’énergie et des protéines qu’il dispense, il diminue le risque de maladies coronariennes et améliore la santé cardio-vasculaire. Le poisson est également un grand fournisseur de n-3 poly acides gras insaturés à chaîne longue (LC n-3 PUFA), qui sont manifestement liés à un meilleur développement cognitif tel que mesuré par les compétences en lecture jusqu’à l’âge de 12 ans. Soulignons que les oméga-3 à chaîne longue sont naturellement présents dans les microalgues (phytoplancton) ingérées par les poissons.
Pourtant, les produits de la mer constituent la principale source d’exposition humaine au mercure.
Le mercure (Hg) est un élément trace métallique (anciennement appelé métaux lourds) qui est assimilé par les organismes vivants sous une forme chimique biodisponible et très toxique : le méthylmercure (MeHg). Or, le méthylmercure est « stable et à forte affinité pour les protéines », il aura donc « une forte tendance à s’accumuler dans les organismes et à se propager le long des chaînes alimentaires » indique l’INSU.
Le mercure est notamment émis par les activités humaines (exploitation minière, orpaillage, métallurgie, transformation de pâte à papier, combustion des déchets et du charbon en particulier). Il s’est largement disséminé dans les écosystèmes terrestres et marins, jusqu’en Antarctique !
Aujourd’hui, les océans constituent l’un des principaux réservoirs pour le mercure qui s’accumule tout au long de la chaîne trophique : du plancton et des petits poissons jusqu’aux plus gros prédateurs marins : « Présent à de faibles concentrations dans l’eau ou les sédiments sous sa forme méthylée, il peut se concentrer très fortement dans les organismes aquatiques, sa teneur tendant à s’élever au fil de la chaîne alimentaire, à chaque fois qu’une espèce en mange une autre », indique l’Anses. Autrement dit, les grands poissons prédateurs présentent généralement une plus forte teneur en mercure car ils se nourrissent de plus petits animaux qui ont eux-mêmes déjà ingéré du mercure.
La consommation de poissons constitue la principale source d’exposition alimentaire de l’homme au méthylmercure selon l’Anses. Le niveau de contamination augmente chez les espèces marines situées en haut de la chaîne alimentaire : requin, marlin, espadon, lamproie, thon rouge du Pacifique, mais aussi le homard, les petites baleines et les phoques.
Résultat : les poissons et les autres espèces aquatiques consommées par l’Homme ont des concentration en mercure qui dépassent souvent les niveaux de sécurité alimentaire définis par l’Organisation Mondiale de la Santé (OMS).
« Pratiquement tout individu présente au moins des traces de méthyle mercure dans ses tissus, ce qui reflète l’omniprésence de ce composé dans l’environnement et l’ampleur de l’exposition à travers la consommation de poissons et de crustacés » explique l’OMS.
Or, “les risques pour la santé sont tout particulièrement élevés pour le fœtus et les jeunes enfants”, ce qui “constitue donc un enjeu de santé publique d’importance” explique l’IRD.
Le Biodiversity Research Institute et ses partenaires ont effectué près de 26 000 prélèvements dans les zones de pêche autour du globe et le constat est inquiétant.
Certaines espèces de poissons ne devraient tout simplement pas être consommées, comme le marlin, le maquereau roi, l’espadon et le thon rouge du pacifique, qui, paradoxalement fait l’objet de ventes à des prix records pour alimenter quelques restaurants japonais spécialisés dans les sushis. Manger des sushis au thon rouge n’est donc pas recommandé.
D’autres espèces ne devraient être consommées qu’une fois par mois, c’est le cas des autres espèces de thon dont le thon albacore que l’on retrouve notamment dans les boîtes de thon si communes. A ne consommer qu’une fois par mois également : hoplostèthe orange, mérou, merlu…
Bonne nouvelle tout de même : des espèces marines peuvent être consommées une fois par semaine (mais pas davantage) comme le bar, l’anchois, le chinchard, la sardine et le flet.
Et même deux fois par semaine : hareng, maquereau tacheté, mulet, morue.
Selon le rapport, l’aiglefin et le saumon sont les deux espèces de poisson qui présentent le moins de mercure et peuvent donc être consommés librement.
Selon une étude de l’IRD publiée début 2019, la teneur en méthylmercure dans les thons du Pacifique Central et Sud-Ouest dépend non seulement de leur taille et de l’espèce considérée mais aussi de leur origine géographique.
Les plus fortes concentrations en mercure sont retrouvées dans les spécimens les plus grands et dans certaines espèces comme le thon obèse. Toutefois les seuils sanitaires préconisés sont rarement dépassés : seuls 1% des prises d’albacore et de thons germons et 11% des thons obèses, et qui concernent principalement les plus gros individus (>1m), affichent des concentrations supérieures aux niveaux maximums autorisés. « Au vu des bénéfices nutritionnels avérés, notamment les apports en oméga-3 qui préviennent certaines maladies cardiovasculaires, il ne faut pas bannir la consommation de thon mais seulement la modérer », affirme Anne Lorrain Anne Lorrain, spécialiste en écologie marine au laboratoire LEMAR.
Mollusques et crustacés représentaient environ 23 pour cent de la pêche mondiale en 2010. Dans cette catégorie, les crevettes sont les animaux les plus consommés selon l’Organisation des Nations Unies pour l’alimentation et l’agriculture (FAO). La FAO et l’OMS ont récemment évalués les risques et avantages liés à la consommation de poissons et crustacés dans un rapport qui précise notamment les concentrations en mercure pour un large éventail de fruits de mer.
Les moules comme les palourdes et les pétoncles ont une concentration moyenne totale en mercure d’environ 0,02 ppm (en poids humide), et peuvent donc être consommés sans restriction. Ce n’est pas le cas du homard américain (0,22 ppm) qui ne devrait être consommé qu’une fois par mois au maximum.
Même à très faible dose, le mercure est néfaste, notamment sur le développement du cerveau. Ce qui explique que le Dr Edward Groth, conseiller à l’Organisation Mondiale de la Santé, déclare que “des niveaux d’exposition définis comme sûrs par les seuils officiels causent en fait des effets indésirables“.
C’est pourquoi, le Dr Edward Groth préconise de diminuer les valeurs limites de consommation de mercure à un quart des recommandations actuelles des Etats-Unis et de ne pas consommer d’espèces comme le marlin et le thon rouge du Pacifique.
Les recommandations rassurantes de l’Anses : « la consommation de poissons ne présente pas de risque pour la santé au regard du risque lié au méthylmercure. », qui s’appuient sur les valeurs actuelles de l’OMS mériteraient donc d’être révisées.
Selon l’Agence Européenne pour l’Environnement (AEE), “l’incidence sur la santé dépend de la dose ingérée, mais la principale source de préoccupation reste l’effet du mercure sur les fœtus et les jeunes enfants. L’exposition au mercure peut se produire in utero, en raison de la consommation par la mère de fruits de mer. Cela peut avoir des répercussions importantes et permanentes sur le cerveau et sur le système nerveux en développement de l’enfant et entraîner des effets préjudiciables sur la mémoire, le langage, l’attention, ainsi que sur d’autres aptitudes. Selon les estimations, chaque année, rien qu’en Europe, plus de 1,8 million d’enfants naissent avec un taux de mercure supérieur aux limites de sécurité recommandées.”
One Voice nous dresse une synthèse des effets nocifs du mercure sur la santé : « L’intoxication chronique par le mercure, provenant notamment d’aliments contaminés, et de son accumulation dans l’organisme, perturbe le fonctionnement des cellules et des enzymes de nombreux systèmes.
Elle entraîne des symptômes nerveux (perturbations du développement du système nerveux in utero et pendant l’enfance, retard de développement du fœtus même en l’absence de signes toxiques chez la mère, maux de tête, vertiges, anxiété, dépression, fatigue, troubles du sommeil, engourdissement et gonflement des extrémités, tremblements, troubles de la vision et de l’audition…) et cutanés (rougeurs sur la paume des mains et la plante des pieds, urticaire…).
Elle touche aussi l’appareil digestif (hyper-salivation ou sécheresse buccale, diarrhée, constipation, brûlures du tube digestif, douleurs d’estomac, nausées, perte d’appétit, prise de poids ou amaigrissement) et les reins (présence de protéines et de globules rouges dans les urines).
Le mercure agit aussi sur les systèmes cardiovasculaire et respiratoire et induit des troubles du rythme cardiaque (tachycardie, arythmie…), des douleurs cardiaques, de l’hyper ou de l’hypotension, des difficultés respiratoires… Il dérègle le système immunitaire, ce qui peut conduire à des infections répétées et des allergies.
Enfin, le mercure est à l’origine de troubles hormonaux, agissant notamment sur la thyroïde et la reproduction et pouvant conduire à l’infertilité. »
“Le niveau de mercure dans l’océan Pacifique devrait augmenter de 50% d’ici 2050 si les tendances actuelles se poursuivent“, a déclaré Richard Gutierrez, directeur exécutif de Ban Toxics!, situé à Quezon City, Philippines. “Il s’agit d’un appel au réveil pour tous les gouvernements afin d’endiguer la marée montante de la pollution au mercure et finaliser un traité ambitieux.”
Avec l’effondrement dramatique des stocks de poissons et la raréfaction des grands prédateurs marins, cette contamination au mercure pourrait, si les consommateurs s’en soucient, permettre à certaines populations de poissons se reconstituer. En attendant, il devient de plus en plus complexe de se nourrir :
Plus que jamais, un régime quasi exclusivement végétal, équilibré et varié, issu d’une agriculture biologique ou familiale locale s’impose comme le meilleur compromis pour manger sainement.
En seulement quelques générations, les activités humaines ont réussi à polluer l’ensemble des écosystèmes de notre planète au point que les progrès que nous avions réalisé en terme de sécurité sanitaire pour l’alimentation sont largement compromis. Une réalité bien tragique…
Christophe Magdelaine / notre-planete.info
Tous droits réservés
Comment manger du poisson sans s’intoxiquer au mercure ? ; 04/03/2019 – www.notre-planete.info
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Questions / réactions (74)
@ Cadet Jennifer : à ma connaissance, le cuivre n’est pas suivi ou problématique pour les poissons, c’est le méthylmercure qui représente un risque.
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